vendredi 28 juillet 2017

Criticat #19

Le dix-neuvième numéro de la revue Criticat vient de sortir. A l'exception d'un court article sur la ville de Yangon (en Birmanie), ce numéro est entièrement consacré à une critique de l'idée d'innovation qui serait dominante en architecture depuis le mouvement moderne. On commence avec un long et très bon article de Françoise Fromonot sur la récente réhabilitation de l'immense entrepôt Macdonald dans le nord-est de Paris : l'auteur reconstitue l'histoire de ce projet, symptomatique des écueils de la politique urbaine et architecturale de la municipalité de Paris. La juriste Stéphanie Sonnette passe ensuite en revue les éléments de la novlangue technophile et anglicisée des architectes, faite de politiquement correct écologique et d'exaltation de la participation. On peut aussi lire le texte d'une conférence de David Edgerton sur la nécessité de relativiser l'idée d'innovation dans l'histoire des technologies. Valéry Didelon se montre lui aussi sceptique sur l'intérêt des innovations dans le domaine de l'architecture : l'évolution constante des normes aurait surtout pour objectif de stimuler le marché de la rénovation, elle soumettrait les architectes aux grandes entreprises du BTP et briderait, en fait, toute véritable innovation. Comme à son habitude, la revue publie une anthologie de courts textes sur le thème principal du numéro en cours : on constate que, depuis les années 1970, de nombreux critiques et professeurs ont tenté de tenir un juste milieu entre les modernes favorables à l'innovation technologique et les post-modernes refusant l'idée de progrès en architecture. Dans une interview accordée à la revue, Robert Maxwell (né en 1922) explique lui aussi que l'architecture est plus proche d'un art que d'une science qui permettrait des progrès par accumulation de connaissances. Le dessinateur et architecte Etienne Martin porte quant à lui un regard un peu désenchanté sur les "Lods", logements construits par Marcel Lods à Rouen, devenus localement une icône du modernisme mais irrémédiablement condamnés à la destruction compte tenu d'un système constructif incompatible avec les normes modernes de sécurité...

On peut considérer, avec le recul, que les post-modernes n'étaient pas moins naïfs que les modernes, et qu'il est par ailleurs vain de chercher à tenir l'équilibre entre ces deux tendances. Mais on ne peut que saluer la volonté de prendre des distances avec le mantra faisant de l'innovation la valeur essentielle de tout projet architectural : Criticat n'a jamais aussi bien porté son nom !

vendredi 21 juillet 2017

L'architecture japonaise à Paris au Pavillon de l'Arsenal

Le Pavillon de l'Arsenal présente jusqu'au 24 septembre une exposition consacrée à l'architecture japonaise à Paris. Contrairement à ce que pourrait laisser penser l'affiche qui évoque la période "1867-2017", on commence véritablement le parcours avec les élèves japonais de Le Corbusier pendant les années 1930, notamment Junzô Sakakura (1901-1969), auteur du pavillon japonais de l'exposition internationale de Paris de 1937 (architecte auquel la Maison de la culture du Japon a récemment consacré une exposition). Après l'intermède de la guerre, essentiellement marqué du point de vue des relations architecturales franco-japonaises par le séjour au Japon de Charlotte Perriand, les Japonais se font discrets à Paris, revenant timidement, pendant les années 1950, dans le cadre de projets menés à Paris par l'Unesco. C'est pendant les années 1960, et surtout pendant les années 1970 et 1980 qu'on les voit participer en grand nombre aux concours pour les projets tels que le Centre Pompidou, l'Opéra Bastille ou la BNF. Dans un premier temps, ils  repartent le plus souvent bredouilles, mais forts du soutien du grand amateur du Japon qu'était Jacques Chirac, alors maire de Paris, et par ailleurs soutenus par quelques grands mécènes comme François Pinault, les architectes japonais parviennent à s'imposer, travaillant désormais aussi bien pour des commandes institutionnelles, du logement social ou des maîtres d'ouvrage privés. Ils imposent avec audace, dans leurs constructions, un mélange de rigueur, d'attention au contexte et de souci du détail. Présente depuis près d'un siècle à Paris, de plus en plus visible, l'architecture japonaise méritait bien une exposition. Celle-ci est dans l'ensemble conforme à ce que produit habituellement le Pavillon de l'Arsenal (notons cependant qu'il vaut mieux éviter de visiter les lieux quand des groupes d'enfants s'adonnent très bruyamment au sport sur un mur d'escalade qu'on a eu l'idée saugrenue d'installer en plein milieu du Pavillon de l'Arsenal). 



vendredi 7 juillet 2017

Le Baroque des Lumières à Paris

Le Petit Palais présente jusqu'au 16 juillet une exposition intitulée Le Baroque des Lumières. Chefs d’œuvre des  églises parisiennes au dix-huitième siècle. Cette exposition présente de manière complète, et en suivant globalement la chronologie, les principaux tableaux et décors réalisés pour les églises parisiennes. Elle le fait très sagement, sans se demander ce qui fait la spécificité de la peinture religieuse à l'époque, sans vraiment justifier le terme de "baroque" et sans non plus confronter ce baroque aux théories des Lumières. L'analyse des tableaux est très précise, mais, arrivé à la fin de l'exposition, on manque donc un peu d'une synthèse d'ensemble.